Le satellite Planck cartographie le ciel depuis le point de Lagrange L2. Pourquoi cet endroit, situé à 1,5 million de km de la Terre ? Simplement pour observer confortablement le ciel à l’abri des émissions thermiques du Soleil, de la Terre et de la Lune. En effet ce point est situé sur l’axe Terre-Soleil comme le montre le schéma suivant :
Légende : Position des 5 points de Lagrange du système Terre-Soleil et orbite de Lissajous autour du point L2 suivie par le satellite.
Crédits : ESAChoisir un point d’équilibre permet de minimiser la consommation d’énergie indispensable au satellite pour se déplacer : à ce point le satellite suit naturellement le mouvement de la Terre autour du Soleil. En fait le satellite « essaie de tourner autour de la Terre », mais il est si loin de notre planète (plus de 4 fois la distance Terre-Lune) que le temps que Planck « fasse le tour de la Terre », celle-ci a tellement avancé le long sa trajectoire autour du Soleil que le satellite arrive tout juste à suivre sa rotation !
Cependant, il faut savoir que L2 est un point d’équilibre instable (voir le schéma ci-dessous), ce qui veut dire que si le satellite s’éloigne de L2, il quitte sa trajectoire et « tombe » vers la Terre ou au contraire risque d’être éjecté de l’orbite... Bref, la position n’est pas du tout confortable ! Heureusement il existe un ensemble de trajectoires stables, appelées « de Lissajous », qui sont des orbites autour du point L2. Le satellite Planck suit l’une des orbites de Lissajous (en fait ces orbites sont seulement "presque stables" et il faut réajuster la position régulièrement), à une distance d’environ 400 000 km de L2 (soit environ la distance Terre-Lune) avec une période de 6 mois.
Afin de minimiser le carburant, les ingénieurs de l’ESA ont déterminé la trajectoire optimale pour rejoindre le point L2 de façon rapide et économique. La plupart du temps le satellite est en chute libre - il se déplace sans consommer d’énergie et, de temps en temps, du gaz est éjecté par les tuyères pour donner une accélération supplémentaire ou corriger la direction. Le voyage dure un mois et demi et est illustré sur le schéma suivant :
Légende : Illustration de la trajectoire du satellite Planck de la Terre au point de Lagrange L2.
Crédits : ESALe lancement du satellite Planck a été si parfait qu’une seule manœuvre d’injection a été nécessaire le lendemain du lancement, le 15 mai. La manœuvre de mi-course, en deux parties, a eu lieu au cours de la première moitié de juin. Enfin, la manœuvre d’injection dans l’orbite autour de L2, en deux parties elle aussi, a eu lieu au cours de la première moitié de juillet.
Au cours de la mission, des manœuvres régulières sont indispensables pour que le satellite reste sur son orbite. En effet, de minuscules écarts à la trajectoire optimale initiale se traduiraient à la longue par une mauvaise position. Les ingénieurs de l’ESA peuvent réajuster la position du satellite en éjectant une quantité extrêmement bien contrôlée de gaz par de toutes petites tuyères placées sur le module de service. Ainsi 12 manœuvres ont été effectuées durant les 30 mois d’opérations de l’instrument HFI.
En parallèle, le satellite est « dépointé » environ une fois par heure. La stratégie d’observation de Planck est de décrire un grand cercle dans le ciel chaque minute (enfin presque un grand cercle car l’angle entre l’axe du satellite et l’axe optique est de 85 degrés et non 90 degrés). Un même cercle est décrit une cinquantaine de fois puis l’axe du satellite est légèrement décalé pour cartographier une nouvelle bande de ciel. Ainsi Planck suit le mouvement de la Terre autour du Soleil pas à pas.
Légende : Schéma de la stratégie de pointage de Planck : des séries de cercles balayés à la vitesse de 1 tour par minute (tpm), un déplacement autour du Soleil de 1 degré par jour.
Crédit : ESA / medialab
Afin de pouvoir observer tout le ciel il est nécessaire d'ajouter un petit cercle décrit par l'axe de rotation autour de la direction anti-solaire pour explorer les pôles écliptiques (car l’angle d’ouverture est de 85 degrés et non 90 degrés). Ainsi l’axe de rotation du satellite suit une cycloïde, un peu comme un point sur une roue de vélo ! De plus cette "strategie cycloidale" permet de minimiser les perturbations thermiques puisque l'angle d'orientation par rapport au Soleil reste toujours constant.
Enfin il est important d’avoir une observation du ciel la plus uniforme possible, même si une totale uniformité est incompatible avec la stratégie d’observation.
Légende : carte du nombre de mesures par pixel (pour 24 mois d’observation, détecteur à 143 GHz, pixel de 2 arc-minute environ). Le bleu foncé correspond à une centaine d’observations par pixel, le rouge foncé à 150 000 observations par pixel (échelle logarithmique). Les croisements des “grands” cercles autour des pôles écliptiques sont responsables du nombre très importants de mesures dans ces régions.
Crédits : ESA / collaboration HFI/LFI
Une fois les opérations achevées pour les deux instruments, que faire du satellite ? Et bien, ce n’est pas encore décidé... Les ingénieurs de l’ESA étudient plusieurs solutions : une éjection vers l’extérieur de l’orbite autour de L2, une rentrée dans l’atmosphère terrestre ou un “crash contrôlé” sur la Lune. En effet, sans réajustement régulier, le satellite risquerait un jour de retomber n’importe où sur Terre ou de heurter un autre satellite - même si le risque est extrêmement faible, il est inutile de risquer une collision dangereuse... L’avantage d’une destruction du satellite sur la Terre ou sur la Lune est qu’il ne sera plus nécessaire de le surveiller pour s’assurer de sa trajectoire effective.
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