Derrière ce mot se cache un phénomène qui accompagne notre vie quotidienne. On parle par exemple de lunettes de soleil polarisées, ou de lunettes polarisées pour voir des films en 3D. Le verre polarisé possède une couche de traitement supplémentaire : les reflets sur les surfaces réfléchissantes comme la neige ou l’eau sont nettement diminués comme on le voit sur cette illustration. Pour les films, en fait deux images de polarisations différentes sont projetées. Grâce aux lunettes spéciales, une image est vue par un oeil, l’autre par l’autre oeil et le cerveau reconstitue la profondeur, comme dans la vraie vie.
Légende : Illustration de l’effet des lunettes de soleil polarisées.
Crédits : Vue d’ailleurs
Chaque photon contient deux informations “faciles” à identifier : la couleur (ou fréquence ou longueur d’onde) et la direction. Mais il transporte aussi une autre information qui est son angle de polarisation. Si on représente le photon comme une onde, donc par une sinusoïde, celle-ci a une période (c’est sa longueur d’onde), elle se déplace le long d’une droite (c’est sa direction) dans un plan perpendiculaire à cette direction et dans ce plan, elle a une orientation, c’est son angle de polarisation.
Illustration des informations portées par un photon
La lumière d’une flamme de bougie par exemple est essentiellement “non polarisée” : tous les angles de polarisation sont également présents, aucune direction n’est privilégiée. Mais si la lumière interagit avec de la matière - si elle est réfléchie par la neige ou si elle passe à travers un polariseur par exemple, certaines directions de polarisation sont privilégiées. La lumière devient polarisée. Mieux ! La direction de polarisation et la proportion de lumière qui a cette polarisation cohérente nous renseigne sur l’interaction qui a eu lieu : la nature du matériau réfléchissant ou l’angle du polariseur par exemple.
Crédits : LPSC
La polarisation témoigne de la dernière interaction de la lumière avec la matière : la polarisation du rayonnement fossile nous permet de “voir” la matière tomber vers les zones de sur-densité ou fuir les zones de sous-densité... près de 400 000 ans après le Big-Bang !
Un photon peut être décrit de façon équivalente comme une particule ou comme une onde. Pour comprendre la polarisation c'est le côté ondulatoire qui permet de décrire ce qui se passe.
Un photon qui se propage est associé à un champ électrique (E) et un champ magnétique (B) tous deux orthogonaux entre eux et à la direction de propagation. Si le champ électrique reste dans un même plan, on dit que le photon est polarisé lineairement.
Lorsqu'un photon rencontre un électron, l'électron absorbe le photon et en émet un autre, dans une autre direction.
Le champ E du photon diffusé doit rester perpendiculaire à la direction de propagation du photon diffusé mais seule la composante du champ électrique orthogonale au plan de diffusion est intégralement transmise. La composante qui se trouve dans le plan de diffusion est atténuée en fonction de l'angle de diffusion jusqu'à l'extinction dans le cas d'une diffusion à 90° par rapport à la direction initiale.
E : champ électrique - B : champ magnétique
Supposons que l'on envoie une lumière entièrement polarisée vers un polariseur. L'intensité est maximale quand le polariseur a "la bonne" orientation (c'est à dire orthogonal au plan de propagation du photon) et minimale si le polariseur est orienté dans l'autre sens. C'est finalement assez simple et logique : si le champ électrique E est dans le même sens que les fils du polariseur, le photon est "absorbé" par les fils : il est converti en électricité et "disparait" en tant que photon. Si le champ est au contraire orthogonal aux fils, le photon traverse sans encombre la grille : l'intensité est entièrement transmise.
En utilisant 2 polariseurs orthogonaux, on arrive à retrouver la proportion de photons qui sont polarisés et avec quel angle.
Lorsque la longueur d'onde (c'est à dire la distance entre 2 crètes) est petite devant l'espace séparant deux fils du polariseur, le photon passe quelle que soit l'orientation de son champs électrique (E). Il faut donc toujours utiliser un polariseur adapté à la lumière étudiée.
1 - Les fluctuations de densité
Il y a deux causes possibles aux anisotropies qui créent la polarisation. Tout d’abord, les variations de densité, celles qui créent aussi les anisotropies de température du rayonnement fossile, entraînent des mouvements de matière qui forment les asymétries nécessaires à la naissance de la polarisation. L’étude de la polarisation nous permet donc de mieux comprendre ces mouvements de matière au moment du découplage. Ce signal primordial est environ 10 fois plus faible que le signal total. Planck va réaliser la première cartographie complète du ciel avec une sensibilité suffisante pour détecter ces anisotropies polarisées.
2 - Les ondes gravitationnelles primordiales
Lorsqu’une onde gravitationnelle se déplace, elle comprime l’espace suivant une direction, relâche, comprime suivant la direction perpendiculaire à la première, puis relâche. Cette compression produit elle aussi des anisotropies quadrupolaires qui polarisent une partie des photons du rayonnement fossile. Si on détecte cette polarisation, on pourra donc, et ce pour la première fois, obtenir des informations sur l’état de l’Univers lors de ses premières fractions de seconde. Mais ce signal est 100 à 1000 fois plus faible environ que le signal total, il est donc extrêmêment difficile à détecter … même pour Planck
La matière est en train de converger vers le centre d’une surdensité. En se déplaçant, la matière se compresse dans la direction transverse plus que dans la direction radiale. Il y a création d’un quadrupole. | Les seules ondes gravitationnelles capables de polariser le rayonnement fossile sont celles nées pendant les premières fractions de seconde de l’Univers. |
La polarisation induite par les ondes gravitationnelles est différente de celle induite par les anisotropies de densité.
Les angles de polarisation forment des figures qui montrent, directement, l'origine physique de cette observation :
Sous-densité : ce lieu se vide de son contenu | Sur-densité : la matière tombe vers le centre | Compression de la matière par le passage d’une onde gravitationnelle |
Ainsi les tirets sur la carte du rayonnement fossile tracent les mouvements de matière moins de 400 000 ans après le Big-Bang !
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