Ces données étaient annoncées pour fin 2014 mais leur caractérisation complète a pris un peu plus de temps que prévu… De somptueuses images accompagnent ces résultats.
Légende : Le rayonnement fossile cartographié par Planck sur tout le ciel. Les couleurs tracent la température qui témoigne de la répartition de la matière. Les textures matérialisent les lignes de champ créées en chaque point par l'orientation de la polarisation. Elles témoignent des mouvements de cette matière. Le signal polarisé est largement dominé par les ondes de densité (appelées aussi modes scalaires ou modes E). La carte est lissée sur 5 degrés ou 20 arc-minutes.
Crédits: ESA - collaboration Planck
Si on zoome sur cette carte, on voit clairement que le relief présente des structures différentes :
A une échelle donnée, la polarisation va avoir tendance à donner des motifs en cercle ou en étoile, selon que l'on a affaire à des sous-densités (où les mouvements de matière vont vers l'extérieur) ou des sur-densités (sur lesquelles tombe la matière environnante). Ces effets sont d'autant plus marqués qu'on les moyenne sur de nombreuses sur-densités et sous-densités de taille fixée.
La polarisation dessine ses motifs les plus intenses à petite échelle, ce qui la rend particulièrement difficile à représenter dans son intégralité. Sur une carte couvrant tout le ciel, on se trouve contraint de lisser les motifs de polarisation à 5 degrés, sans quoi la carte est inesthétique et difficilement lisible.
Pour voir les structures plus petites du signal polarisé, il est indispensable de se restreindre à une portion du ciel. Mais, même ainsi, les plus petits motifs doivent encore être lissés (à 20 minutes d’arc). On représente une information certes toujours partielle, mais parlante.
Ces cartes tracent toute l’information en polarisation. On peut séparer l’information en polarisation en deux catégories : les modes E ou scalaires dessinent des motifs circulaires ou en étoiles alors que les modes B ou tensoriels présentent des structures en spirale. L’intérêt est que ces modes différents ont pour origine des processus physiques différents.
Les modes E sont très largement dominants car aucun processus ne génère de grandes quantités de modes B, de sorte que ceux-ci sont invisibles sur la carte ci-dessus. En effet les modes B issus de la distorsion des modes E par effet de lentille gravitationnelle sont détectés par Planck mais le signal est environ dix fois plus faible que le signal en modes E. Cette représentation du signal polarisé trace donc, de fait, la part en modes E.
Bien-sur il y a aussi les modes B primordiaux qui ont pour origine des processus très anciens s'étant déroulés lors des époques les plus anciennes du Big Bang. Le signal est encore nettement plus faible que celui produit par effet de lentille gravitationnelle. Heureusement ces signaux se présentent à des échelles angulaires différentes, donc on peut les distinguer. La recherche de ces modes B, même si elle est très difficile, représente un enjeu scientifique majeur désormais.
La visualisation de la polarisation a été un véritable casse-tête… La méthode finalement retenue utilise une technique dite de "Line Integral Convolution". Les textures sont définies comme le lissage, le long de trajectoires virtuelles déterminées par l'orientation de la polarisation, d'un champ aléatoire sous-jacent (ici un bruit blanc), matérialisant ainsi les lignes de champ de la polarisation.
Les propriétés statistiques des fluctuations visibles sur les cartes sont représentées par le spectre de puissance. C’est exact sous réserve que les fluctuations suivent une statistique gaussienne. Cette propriété peut être vérifié en regardant non plus les corrélations entre deux points mais entre trois points de la carte. C’est ce qu’on appelle des bi-spectres.
L’amplitude des bi-spectres local, équilatéral et orthogonal (il y a différentes façon de choisir les triplets de points) est nulle si les fluctuations sont effectivement gaussiennes.
L’inflation doit générer des fluctuations gaussiennes (ou du moins avec un un niveau de non-gaussianité en deçà de la sensibilité de Planck) alors que des modèles plus exotiques génèrent des fluctuations avec un niveau de non-gaussianité bien plus important.
Les amplitudes mesurées par Planck sont toutes parfaitement compatibles avec 0 - et sont les contraintes les plus précises à ce jour sur la non-gaussianité. Donc :
Nous avions que la carte en température du rayonnement fossile présentée en 2013 était “définitive”, c’était essentiellement vrai. En 2015 la carte en température est un tout petit mieux, mais en revanche le gain en polarisation est tel que la collaboration livre aujourd’hui la carte du rayonnement fossile polarisé. Pourquoi est-ce mieux ? Nous avons un peu plus de données (donc moins d’erreur statistique) et une analyse améliorée (donc moins d’erreur systématique). Il reste en revanche des effets non totalement maitrisés aux échelles angulaires supérieures à 10 degrés, la carte a donc été “filtrée” pour ne contenir que des informations cosmologiquement fiables et exploitables.
Légende : spectre de puissance angulaire en température (TT, en haut), en polarisation (EE, en bas) et en croisant température et polarisation (TE, au milieu). On notera que l’unité choisie est un peu différente en EE pour des raisons graphiques. Sous chaque spectre est tracée la différence entre les données (en bleu) et le modèle (trait rouge).
Crédits : ESA- Planck - collaboration
Le gain en polarisation est largement aussi impressionnant entre WMAP et Planck qu’il ne l’était en température entre COBE et WMAP.
C’est bien-sûr le même modèle avec le même jeu de paramètres qui ajuste “parfaitement” l’ensemble des données.
La qualité des spectres et la précision des paramètres cosmologiques sont garantis par un travail titanesque de comparaison de méthodes développées par plusieurs équipes et de simulations destinées à vérifier la prise en compte de tous les facteurs liés aux instruments, à la mission et au signal astrophysique.
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