Des images que vient d'obtenir la mission Planck de l'ESA révèlent les détails de l'organisation des régions les plus froides de notre Galaxie. Des nuages filamentaires prédominent, qui connectent les plus grandes échelles de la Voie Lactée aux plus petites. Ces images sont un sous-produit de cette mission qui produira à terme la photographie la plus détaillée jamais obtenue de l'Univers primordial.
Planck, observatoire de l'ESA des fréquences micro-ondes et première mission européenne conçue pour étudier le rayonnement cosmologique fossile (RCF), vient de commencer le deuxième de quatre relevés successifs du ciel. Ces données vont à terme fournir les informations les plus détaillées jamais obtenues sur la taille, la masse, l'âge, la géométrie, la composition et le destin de l'Univers observable. Bien que la mission première de Planck soit de cartographier le RCF, en imageant l'intégralité du ciel avec une combinaison sans précédent de résolution angulaire, de sensibilité, et de largeur du domaine en fréquences couvertes, Planck va aussi fournir des données précieuses pour nombre d'études astrophysiques. De nouvelles images de Planck, publiées ce jour, en donnent l'illustration en révélant la distribution de la poussière froide de notre Galaxie et la structure du milieu interstellaire qui l'emplit.
Ces images sont un produit scientifique annexe de l'analyse des données en cours qui vise à produire des cartes du RCF de la plus haute sensibilité (quelques parties par million) et de la plus haute résolution (5 minutes d'arc). Une partie de l'analyse consiste à soustraire la contribution des émissions non cosmologiques d'avant-plan qui sont émises par un certain nombre de « contaminants » afin de révéler la véritable distribution angulaire du RCF. Ces émissions "parasites" sont notamment le dipôle cosmique (un signal dû à notre déplacement par rapport au fond cosmologique) ainsi que le rayonnement du gaz et de la poussière de la Voie Lactée et des galaxies éloignées. Une série de cartes scientifiquement très intéressantes sont ainsi obtenues au cours de ce processus. Les cartes finales seront construites à partir d'une collection d'images similaires à ces premiers aperçus de Planck.
Une des caractéristiques essentielles de Planck est son aptitude à révéler la température des particules de poussière les plus froides. La température est un indicateur physique important car il reflète l'équilibre des énergies en présence dans le milieu interstellaire, et cet équilibre n'est pas le même d'un endroit à l'autre, ce qui révèle l'évolution du processus de formation des étoiles.
Une des recherches astrophysique que permet Planck est la recherche des amas de poussière les plus froids de la Galaxie, car ce sont les lieux où la formation des étoiles est sur le point de commencer. L'image à gauche (1) montre comment Planck piste cette poussière froide : les tons rougeoyants correspondent à des températures qui peuvent atteindre près de 12 degrés au-dessus du zéro absolu (soit environ -260 degrés Celsius), tandis que les tons à base de blanc correspondent à des régions beaucoup plus chaudes (des dizaines de degrés au dessus du zéro absolu) où des étoiles massives sont en cours de formation.
Planck excelle à détecter partout dans le ciel ces amas de poussière et fournit l'information cruciale nécessaire pour mesurer la température de la poussière à ces grandes échelles. En combinant les données de Planck avec celles d'autres satellites, comme Herschel de l'ESA ou Spitzer de la NASA (qui tous deux sondent les échelles très petites où a lieu la formation des étoiles), mais aussi IRAS (qui a cartographié tout le ciel à des longueurs d'onde plus courtes), les astronomes vont pouvoir étudier la formation des étoiles de la Voie Lactée dans son ensemble.
Des structures filamentaires parcourent le cosmosL'espace entre les étoiles n'est pas vide, il contient des nuages de poussière et de gaz intimement mêlés qui forment le « milieu interstellaire ».
Les grands nuages qu'on voit sur cette seconde image de Planck (2-droite), qui couvrent une région de près de 55 degrés de large, donnent à voir la structure filamentaire du milieu interstellaire dans le voisinage solaire (à moins de 150 pc, à moins de 500 années –lumière du soleil). Les filaments locaux sont reliés au disque de la Voie Lactée, la bande horizontale sombre au bas de l'image, où les émissions viennent de distances dans le disque beaucoup plus grandes.
L'image de gauche (2-gauche) montre une « pouponnière stellaire » typique (d'environ 3 degrés de large) dans la constellation de l'Aquila (aigle), dont l'image vient d'être prise par l'Observatoire Spatial Herschel. La structure filamentaire vue aux toutes petites échelles par Herschel a une ressemblance frappante avec celle vue par Planck aux plus grandes échelles.
Pour s'orienter, la région du ciel couverte par l'image Planck est illustrée par sa superposition à l'image optique du ciel (3) obtenue par Axel Mellinger. La richesse des structures observées, et la façon dont les petites et les grandes échelles sont interconnectées, fournissent des indices importants des mécanismes physiques à la base de la formation des étoiles et des galaxies. Cet exemple illustre la synergie entre Herschel et Planck.
A elles deux ces images permettent de révéler la structure autant à grande qu'à petite échelle de notre Galaxie.
Planck cartographie le ciel dans neuf bandes de fréquence en utilisant deux instruments de dernière génération, conçus pour produire des mesures multifréquences et à haute sensibilité du rayonnement diffus du ciel : l'instrument Haute Fréquence (HFI) couvre six bandes entre 100 et 857 GHz, et l'instrument Basse Fréquence (LFI) couvre trois bandes entre 30 et 70 GHz.
Le premier relevé intégral du ciel par Planck a débuté en août 2009 et est aujoud'hui complet à 98 %. La dernière partie partie de ce relevé ne sera acquise qu'à la fin mai 2010. Planck va ensuite collecter des données jusqu'à la fin 2012, lui permettant d'établir quatre relevés successifs du ciel complet. Un premier ensemble de données astronomiques, appelé 'catalogue initial de sources compactes' sera rendu public en janvier 2011. Les principaux résultats cosmologiques demanderont quant à eux deux années supplémentaires de traitement et d'analyse des données, afin d'arriver à un premier ensemble de données traitées et disponible pour la communauté scientifique mondiale vers fin 2012.
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